Comment détecter et lutter contre la maltraitance animale en milieu urbain ? Le nouveau Rendez-vous de l’Animal en Ville planche sur la question

Le 9e Rendez-vous de l’Animal en Ville, animé par Katia Renard et organisé par Mars Petcare, s’est tenu ce jeudi 30 mars 2023. 4 fervents défenseurs de la cause animale sont intervenus pour traiter la problématique suivante : comment reconnaître et faire face à la maltraitance animale en milieu urbain ?

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De nos jours, 75% des Français vivent dans les villes, où la maltraitance animale constitue une triste réalité. En 2021, 12 000 infractions contre les animaux ont été relevées sur notre territoire, et seule une centaine d’entre elles font l’objet d’un dépôt de plainte auprès des forces de l’ordre. Comment agir pour mettre fin à ce fléau et mieux protéger nos animaux ?

Autour de Katia Renard, rédactrice en chef de 30 Millions d’Amis et de Romain Dumas, PDG de Mars Petcare, 4 intervenants ont tenté d’apporter leurs solutions : Anne-Claire Chauvancy, présidente d’APA (Action Protection Animale) ; Anne-Claire Gagnon, vétérinaire et membre d’AMAH (Association contre la Maltraitance Animale et Humaine) ; Céline Gardel, chef d’État major de la police nationale et présidente de l’association Les 4 Pattounes ; et Luc Carvounas, maire d’Alfortville (94).

Soutenir le travail des associations

Créée en 2020, l’association Action Protection Animale lutte contre toutes les formes de souffrance animale et milite pour le développement d’un arsenal juridique plus protecteur à destination de toutes les espèces. Elle travaille en lien avec de nombreux acteurs (policiers, gendarmes, services administratifs et particuliers) afin de mettre fin au calvaire de plus de 2000 victimes.

« Un agent assermenté doit nous autoriser à prendre en charge l’animal, indique Anne-Claire Chauvancy. Cela peut se faire en un claquement de doigts selon la gravité de la situation. Nous restons alors gardiens de l’animal jusqu’à ce qu’une décision judiciaire soit rendue. Lorsque le dossier est bien ficelé, le taux de poursuite est bon. »

Dans leur mission, les bénévoles rencontrent quelques fois certains obstacles. « Les animaux restent parfois très longtemps dans des refuges ou des familles d’accueil dans l’attente d'un jugement. Aujourd’hui, nous en avons environ 500 dans cette situation ». Anne-Claire Chauvancy ajoute que la formation des personnes assermentées mérite d’être améliorée pour des actions plus rapides.

Pour la présidente, aucun animal n’est « implaçable », même s’il a vécu l’horreur. « Leurs séquelles psychologiques et physiques sont importantes, mais ils sont très résilients. Ils passent de manière surprenante à autre chose. Il faut du temps, de l’affection et être à l’écoute. Il n’y a rien de plus beau que d’accompagner son animal dans son renouveau », déclare-t-elle en partageant quelques mots tendres au sujet d’Owen, sa « crème de chien ».

Pour terminer, Anne-Claire Chauvancy rappelle que le fait d’intervenir seul sur un cas de maltraitance est « à double tranchant ». « Pensez surtout à recueillir des preuves, photos ou vidéos, faites le 17 et contactez une association ». Ce qui permettra d’éradiquer ce fléau, selon elle, c’est également de conserver cette « belle synergie » entre tous les acteurs concernés.

« Former et informer » la population

L’Association contre la Maltraitance Animale et Humaine a vu le jour en avril 2018. Son objectif est de faire connaître le lien qui existe entre les violences faites aux animaux et celles faites aux personnes, et de fédérer tous les acteurs concernés afin de prévenir ces actes. « Quand un animal est maltraité, il y a potentiellement un membre de la famille en danger », explique Anne-Claire Gagnon, vétérinaire et membre de l’association.

La corrélation entre ces 2 formes de violence est établie, rappelle Anne-Claire Chauvancy : un climat familial difficile, une précarité financière et intellectuelle ainsi qu’une insalubrité sont prédominants dans les cas rencontrés.

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L’AMAH souhaite sensibiliser les professionnels qui peuvent constater les situations de violence, comme les soignants ou les vétérinaires. Depuis 2021, ces derniers peuvent faire des signalements. « Un chat ou un chien porteur de lésions, de fractures antérieures ou régulièrement présent en consultation » font partie des signes révélateurs de maltraitance répétée.

Il est également essentiel de montrer l’exemple aux enfants (parfois spectateurs - et même victimes - de cette violence), et de former les professeurs sur cette cause. « À l’école, la présence d’un chien d’assistance peut apprendre aux plus jeunes qu’avec une éducation bienveillante, on peut faire des miracles avec les animaux », cite Anne-Claire Gagnon à titre d’exemple.

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« En sensibilisant tous les acteurs, nous parviendrons à faire avancer les choses. Nous devons continuer à former et à informer à propos de ces maltraitances communes », souligne la vétérinaire. Pour rappel, l’AMAH peut fournir aux professionnels un véritable accompagnement dans la gestion de situations graves, en travaillant en collaboration avec les services de la justice.

Faire de la formation des forces de l’ordre un « levier »

En tant que capitaine de police, Céline Gardel n’a pas tardé à remarquer que ses collègues n’étaient pas sensibilisés aux procédures en lien avec la maltraitance animale. Heureusement, depuis 2020, les policiers sont bien mieux formés dans ce domaine. « Ils apprennent à appréhender un animal, se renseignent sur la réglementation des chiens de catégorie […] à ce jour, 2000 membres des forces de l’ordre ont été formés. On gagne en efficience », affirme-t-elle.

Désormais, tous les gardiens de la paix bénéficient d’une formation initiale de 9 heures sur cette thématique, et comme l’a rappelé Céline Gardel, 4000 référents de commissariats et de brigades de gendarmerie vont être formés sur les questions de maltraitance animale (suite aux annonces du ministre Gérald Darmanin).

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Pour éviter les récidives, la capitaine de police sait qu’il faut aller plus loin. « Nous avons créé des conventions pour un stage d’une journée, co-animé par des policiers, vétérinaires et éducateurs canins, où nous réfléchissons tous ensemble aux besoins de l’animal, et où nous rappelons les sanctions encourues. »

Le premier essai a eu lieu le 9 février dernier, et Céline Gardel en garde un bon souvenir. « À l’issue de la journée, les stagiaires ont reversé 150 € à une association. Les retours sont très positifs. Les gens ont appris et regretté beaucoup de choses. C’était très enrichissant. »

Pour elle, la maltraitance s’explique par une méconnaissance de l’animal. En organisant ces stages, la capitaine de police espère qu’elle ralliera de « nouveaux maillons » à sa cause. « Nous devons amener tout le monde à réfléchir sur ce sujet. Plus on est nombreux, et plus on va y arriver », conclut-elle.

Élargir le pouvoir d’intervention des élus

Luc Carvounas, maire d’Alfortville, dénonce le manque de moyens des maires pour lutter contre la maltraitance animale. Ces « premiers magistrats des villes » sont souvent impuissants face à des situations intolérables.

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« Il y a un trou dans la raquette au niveau de la législation concernant la maltraitance animale, explique-t-il lors du webinaire. Quelles que soient les intentions des associations, si on ne nous donne pas les moyens légaux d’agir, on n’y arrivera pas. Par ailleurs, nous devons souvent faire face à des condamnations aberrantes. »

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Ce qui pose souci, selon Luc Carvounas, c’est la notion de propriété qui unit un animal à son bourreau : « Je peux constater une souffrance, mais je n’ai pas le droit d’intervenir en raison de ce lien de propriété. Aujourd’hui, je ne peux pas demander à ce qu’un animal maltraité soit relogé ou soigné. On ne le reconnaît pas comme être doué de sensibilité, c’est ça le problème. »

C’est alors « toute une chaîne » qu’il faut repenser, souligne Katia Renard. Le maire d’Alfortville compte bien « continuer le combat politique » pour faire évoluer les choses, mais il reste confiant pour l’avenir. « On y arrivera. C’est dans le sens de l’histoire. On ne peut pas faire machine arrière », conclut-il.

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