Que devient votre animal en cas de divorce ?

Quel est l’avenir de l’animal au prononcé du divorce ? Si cette question ne pose pas de problème aux animalistes, c’est loin d’être le cas pour d’autres personnes. Certaines se posent la question de savoir si l’argent du contribuable sert à régler ce type de litige ?

Illustration : "Que devient votre animal en cas de divorce ?"

Face à cette situation, des magistrats ont parfois refusé d’intervenir (ex : Cour d’appel Bordeaux, chambre civile 6e, 27 janvier 2009). Néanmoins la Cour de cassation a rappelé « que le droit au respect de la vie familiale exige que le juge du divorce statue sur la demande d’attribution d’un animal de compagnie du couple, et sur la demande d’attribution de sa jouissance ; que dès lors, en jugeant qu’elle n’était pas compétente pour statuer sur la demande portant sur le chien, bien dont la jouissance serait discutée lors des opérations de liquidation et de partage de l’indivision, la Cour d’appel a violé l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ensemble le Préambule de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie. » (ex : Cour de cassation, chambre civile 1, 20 novembre 2013).

La question du devenir des animaux est importante en raison notamment du lien affectif fort unissant les animaux et les Hommes et surtout en raison de la loi n° 2015-177 du 16 Février 2015 introduisant l’article 515-14 dans le Code civil. Cet article dispose : « Les animaux sont des êtres vivants doués de sensibilité. Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des biens ». Mais le régime matrimonial est à prendre en compte également.

Le rôle important du régime matrimonial dans l’attribution de l’animal à l’un des époux

En principe, le devenir de l’animal dépend du régime matrimonial (il règle les intérêts financiers des époux pendant le mariage et à sa dissolution). Est-ce que pour autant la qualité exceptionnelle de l’animal prime sur les règles du partage ? Rien n’est moins certain d’autant que la jurisprudence (ensemble de décisions rendues par les juridictions) n’a pas de réelle ligne directrice puisque si un juge considère l’animal comme un bien, un autre peut le considérer comme un enfant. Ainsi, une grande part de subjectivité existe. Néanmoins les magistrats appliquent les règles du régime matrimonial choisi par les époux, lesquelles sont précisées dans le Code civil.

Au cours d’un divorce, deux phases sont à distinguer :

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  • La première est une phase provisoire ; elle concerne l’attribution de l’animal de compagnie au cours de la procédure de divorce
  • La seconde est la liquidation du régime matrimonial conduisant à l’identification du propriétaire.

Au cours de la procédure de divorce, le juge conciliateur doit répondre à la question de savoir chez qui l’animal va vivre provisoirement. Le magistrat peut faire une application stricte des textes en identifiant la masse à laquelle rattacher l’animal. S’il a été acheté sur des deniers communs sous un régime matrimonial communautaire, la tâche du juge est difficile car il va devoir choisir en se fondant sur des éléments généralement subjectifs. C’est ainsi qu’il peut se fonder sur le lien d’affection afin de départager les époux ou plus simplement prendre sa décision en fonction du détenteur du document de la société d’identification des carnivores domestiques (ex : Cour d’appel Rouen, Chambre de la famille, 5 janvier 2017). Il convient de préciser que les juges considèrent que les frais d’entretien doivent être mises à la charge de l’époux détenteur de l’animal (ex : Cour d’appel Paris, Chambre de la famille, 5 janvier 2012).

L’attribution de l’animal au propriétaire définitif va dépendre du type du régime matrimonial choisi par les époux. On en distingue deux: la séparation de bien et la communauté.

Ainsi si les époux ont opté pour une séparation de bien, l’animal peut être considéré comme un bien propre s’il a été acheté par l’un des deux époux avant le mariage. Il en va de même lorsque l’animal a été acheté par l’un des époux pendant le mariage avec ses deniers propres. Encore faut-il en apporter la preuve, au risque sinon de voir l’animal tomber dans les biens indivis. (L’ indivision sert à règler les intérêts financiers des époux pendant le mariage et à sa dissolution).

Sous un régime de communauté, lorsque l’animal a été acheté pendant le mariage il est alors considéré comme un bien commun et cela même si un seul des époux l’a acheté.

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Le rôle important de la prise en compte de l’être vivant doué de sensibilité

Tout semble clair mais c’est loin d’être le cas en pratique. Le plus simple est le divorce par consentement mutuel ; les époux indiquent dans la convention ce qu’ils ont prévu pour leur animal. Dans les autres cas de divorce, il existe un aléa se basant sur la subjectivité du juge aux affaires familiales, lequel n’est pas tenu d’appliquer à la lettre les différents régimes matrimoniaux. C’est ainsi qu’un animal acheté seul par un époux (qui est donc un bien propre) peut être attribué à l’époux qui n’en est pas le propriétaire (ex : Cour d’appel Bordeaux, chambre civile 6, 2 juillet 2014). De plus, certains magistrats n’ont pas hésité à accorder un droit de visite (ex : Cour de cassation, chambre 1, 8 octobre 1980) et à mettre en place une garde alternée (ex : Cour de cassation, chambre civile 2, 26 avril 1990).

L’ambiguïté du droit face à l’animal est marquante ; il est considéré comme un bien mais aimé comme un enfant. Cela aboutit à des jurisprudences particulières qui auraient été inimaginables il y a quelque temps encore. Néanmoins la question se pose de savoir s’il ne faudrait pas l’intervention du législateur (au sens matériel désigne les organes, le gouvernement ou le parlement, qui édictent des normes juridiques générales) pour aller jusqu’au bout de la logique de l’article 515-14 du Code civil ?

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